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 Responsabilité civile des fournisseurs d'accès
Dossier de la semaine du 3 au 9 avril 2000 par Murielle-Isabelle CAHEN, Avocat à la Cour d'appel de Paris et auteur du site Web Avocat-Online .

a responsabilité est l’obligation de réparer le préjudice résultant soit de l’inexécution d’un contrat (responsabilité contractuelle : Art. 1147 C.Civ), soit de la violation du devoir général de ne causer aucun dommage à autrui par son fait personnel (Art. 1382 C.Civ), ou du fait des choses dont on a la garde, ou du fait des personnes dont on répond (Art. 1384 C.Civ) ; lorsque la responsabilité n’est pas contractuelle, elle est dite délictuelle. Quand et qu’elle résulte d’un contrat, elle est dite contractuelle.

Alors que la responsabilité pénale vise à sanctionner une personne qui commet une infraction, la responsabilité civile est l’obligation légale qui incombe à une personne de réparer le dommage causé à autrui.

L’application des principes de responsabilité du Code Civil de 1804 ne se fait pas sans heurts dans le domaine de l’Internet. Le postulat de la liberté, pilier du réseau des réseaux, fait fluctuer les positions de l’irresponsabilité à la responsabilité de principe des acteurs du réseau (les intermédiaires notamment).

La jurisprudence a décidé d’opter pour une sensibilisation des intermédiaires, même passifs, sur leur responsabilité (cf. affaire Estelle Halliday).

L’enjeu étant l’indemnisation, le but de la réflexion est de dégager une hiérarchie des responsabilités, un peu sous la forme du régime de la presse et de sa responsabilité en cascade, afin que tout justiciable puisse " trouver " son responsable sur la toile.

Nous nous cantonnerons ici à l’internaute, auteur de contenu informationnel, et à celui qui supporte l’information : le fournisseur d’hébergement, prestataire technique qui héberge un site sur son serveur informatique.

En ce qui concerne Internet, le problème souvent rencontré est plus technique que juridique : comment identifier à coup sûr l’auteur du site hébergé sur un site gratuit tel que Multimania, Ifrance … et une fois identifié, comment sanctionner l’auteur de messages dommageables qui se trouve à des milliers de kilomètres ?

A défaut ou en plus de l’internaute fournisseur de contenu, pourquoi ne pas responsabiliser celui qui lui fournit cette occasion de communiquer à travers le monde de façon liberticide : le fournisseur d’hébergement.

Sanctionner l’intermédiaire à défaut de l’internaute. Responsabiliser à raison de la fonction.

" Mais participer est une chose, être responsable en est une autre ".

  1. LA RESPONSABILITE DU FOURNISSEUR D’HEBERGEMENT : JURISPRUDENCE

Il y a quelque chose de choquant a priori à se voir dire responsable sans avoir eu de comportement effectivement critiquable. Au civil, dans une logique de responsabilité pour faute, ne doit pas pouvoir voir sa responsabilité engagée celui qui ne pouvait agir ou qui était dans une situation où s’abstenir était légitime.

Si la tendance de bien des intermédiaires est de rechercher à toute force une position d’irresponsabilité qu’on ne saurait accepter, on ne peut davantage tolérer une responsabilité de principe qui serait légitimée par le rôle technique de ces intervenants.

Reconnaître la responsabilité des fournisseurs d’hébergement car ils sont le vecteur de l’information diffusée et permettent les actes délictueux est une aberration.

Dénier toute responsabilité aux intermédiaires car ils n’ont aucun moyen pragmatique de contrôle du contenu est encore un non sens.

Que faire ? Il ne faut pas rester dans l’impasse et choisir la voie de la raison, comme le préconise le professeur VIVANT. Envisager la responsabilité de l’intermédiaire par rapport à cette notion, c’est le rendre responsable , mais aussi l’exonérer de cette responsabilité eu égard aux situations.

N’est fautif que celui qui a la possibilité technique d’intervenir, qui sait qu’il y a matière à intervenir et qui, pour finir, n’est pas intervenu. C’est là le triptyque : pouvoir – savoir – inertie.

L’hébergeur ne verra sa responsabilité engagée qu’à la triple condition :

  • qu’il ait la faculté technique d’intervenir ;
  • qu’il ait eu connaissance du site critiquable ;
  • qu’il ait choisi de ne rien faire.

Ce sont des conditions nécessaires mais pas suffisantes. Quand bien même sa responsabilité pourrait être engagée sur la base du trinôme, encore faut-il apprécier si son comportement emporte ou non la critique (il a pu avoir raison de rester passif).

C’est bien la solution retenue par la jurisprudence dans l’affaire Estelle Hallyday. L’arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 10 février 1999 dans l’affaire Estelle Hallyday contre Valentin Lacambre (Altern) a tranché dans le sens de la responsabilisation des fournisseurs d’hébergement. Le site représentait des photos du mannequin dénudé mis en ligne sans son autorisation, par une personne hébergée sur Altern.

L’ordonnance de référé avait déjà précisé que " le fournisseur d’hébergement a l’obligation de veiller à la bonne moralité de celui qu’il héberge, au respect par eux des lois et des règlements et des droits des tiers… Il a, comme tout utilisateur de réseau, la possibilité d’aller vérifier le contenu du site qu’il héberge et en conséquence de prendre le cas échéant les mesures de nature à faire cesser le trouble qui aurait pu être causé à un tiers ".

L’arrêt de la Cour d’appel confirme et souligne " qu’en offrant, comme en l’espèce, d’héberger et en hébergeant de façon anonyme, sur le site Altern.org qu’il a créé et qu’il gère toute personne qui, sous quelque dénomination que ce soit, en fait la demande aux fins de mise à disposition du public ou de catégories de publics, de signes ou de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature qui n’ont pas le caractère de correspondances privées, M. Lacambre excède manifestement le rôle technique d’un simple transmetteur d’informations et doit d’évidence assumer à l’égard des tiers aux droits desquels il serait porté atteinte dans de telles circonstances, les conséquences d’une activité qu’il a, de propos délibérés, entrepris d’exercer dans les conditions susvisées et qui contrairement à ce qu’il prétend est rémunératrice et revêt une ampleur que lui même revendique ".

L’arrêt souligne donc bien que l’hébergement est une activité qui dépasse la simple transmission de données puisque finalement il participe à la diffusion du site, d’autant plus si cet hébergement se fait, comme en l’espèce, de manière anonyme. L’auteur du site n’étant pas identifiable, il parait logique de se retourner contre celui qui le supporte (support physique : disque dur).

Il doit en conséquence supporter la responsabilité de cette activité (d’autant plus quand elle est rémunératrice).

Il ne s’agit pas ici de créer une responsabilité de principe des intermédiaires. Il s’agit d’une responsabilité pour faute, ou comme en l’espèce d’une violation de l’article 9 du Code Civil (atteinte à la vie privée).

Pour s’exonérer de cette responsabilité, le fournisseur d’hébergement devra justifier du respect des obligations mises à sa charge spécialement quant à l’information de l’hébergé sur l’obligation de respecter les droits de la personnalité, le droit d’auteur, de la réalité des vérifications qu’il aura opérées, au besoin par des sondages, et des diligences qu’il aura accomplies dès révélation d’une atteinte aux droits des tiers pour faire cesser cette atteinte. C'est le trinôme : devoir – savoir – inertie . L’hébergeur commet une faute par omission s’il ne vérifie pas le contenu des sites.

Ainsi, une nouvelle décision est venue refuser la condamnation d’un hébergeur sur le fondement de la responsabilité éditoriale définie par la loi du 29 juillet 1982 (responsabilité en cascade). Dans cette affaire, les assurances Axa, victimes de propos diffamatoires publiés sur un site, demandait des dommages et intérêts à l’hébergeur, Infonie. Suite à un rapport d’expertise, les juges ont constaté qu’Infonie n’avait aucun contrôle sur le transfert des données effectué par l’abonné. Le 28 septembre 1999, le Tribunal de grande instance de Puteaux a donc décidé que seule la personne ayant procédé à la mise en ligne du contenu pouvait être tenue pour responsable.

Mais le 8 décembre 1999, trois fournisseurs d’hébergement ont été condamnés pour avoir abrité des photographies d’une ancienne mannequin, Lynda Lacoste.

Le tribunal rappelle que, contrairement au fournisseur d'accès, " dont le rôle se limite à assurer le transfert des données dans l'instantanéité et sans possibilité de contrôler le contenu de ce qui transite par son service, le fournisseur d'hébergement effectue une prestation durable de stockage d'informations que la domiciliation sur son serveur rend disponibles et accessibles aux personnes désireuses de les consulter " et qu'il a donc " la capacité d'y accéder et d'en vérifier la teneur ".

La responsabilité de l'hébergeur est ainsi résumée : il est tenu à une obligation générale de prudence et de diligence, et il lui appartient de prendre les précautions nécessaires pour éviter de léser les droits des tiers.

A cette fin, il doit mettre en oeuvre des moyens raisonnables d' information, de vigilance et d' action.

Dans l'affaire jugée, le fournisseur d'hébergement avait bien accompli des diligences pour informer clairement les éditeurs de sites sur le respect du droit des tiers (information) et avait procédé à la fermeture du site illicite dès réception de l'assignation de Lynda Lacoste (action). Mais le tribunal relève qu'en revanche il avait la faculté, en tant que professionnel, de détecter les sites présumés illicites, notamment grâce à des moteurs de recherche (vigilance), et qu'il ne l'a pas fait.

Dès lors, cette dernière jurisprudence française impose, une véritable obligation de surveillance et de censure préventive à la charge des prestataires.

Le Tribunal de Grande Instance de Nanterre a rendu une décision le 31 janvier 2000 ( Trois suisses / Axinet)qui a encore renforcé cette jurisprudence.

Selon le Tribunal, la mise en vente aux enchères sur Internet, de noms de domaine reproduisant des marques notoires ( les-3suisses.com, la-redoute.net ) constitue un acte de contrefaçon et "révéle une volonté de parasitisme". Elle engage la responsabilité du déposant des noms de domaine, celle de l’organisateur de la vente mais également celle de l’hébergeur du site sur lequel s’est déroulée la vente litigieuse.

De même, en Belgique, le tribunal de commerce de Bruxelles a récemment condamné un hébergeur pour avoir hébergé deux sites offrant des liens hypertextes vers des sites permettant le téléchargement de MP3. Selon ce Tribunal, l’hébergeur en question peut être considéré comme responsable dès lors qu’il ne supprime pas les liens alors qu’il a été mis au courant d’activités suspectes. Il poursuit en affirmant que les liens en question sont des liens conscients vers des sites pirates connus. L’hébergeur s’est donc rendu complice de la mise à disposition du public belge de reproductions de fichiers de musique. Par conséquent, le Tribunal en conclut que l’hébergeur cause une exploitation illégale en Belgique et des actes illégitimes (Tribunal de commerce de Bruxelles, 2/11/1999).

Est-ce conforme à l’esprit des différents projets de réglementation en la matière ?

2 : FAUT-IL LEGIFERER ?

Si l’application à l’Internet des principes de responsabilité civile n’est qu’une pure transcription des principes de droit commun, est-il nécessaire de légiférer ?

L’amendement Bloche présenté dans le courant de l’année 1999 allait dans le sens ci-dessus évoqué. Il ne visait que la responsabilité civile des intermédiaires. Il prévoyait notamment que cette responsabilité ne pourrait être engagée qu’à deux conditions non-cumulatives. D’une part, si le fournisseur a lui-même contribué à la création ou à la reproduction du contenu préjudiciable; d’autre part, s’il n’a pas, sur demande d’une autorité judiciaire, agi pour empêcher l’accès au contenu litigieux. Cet amendement est donc plutôt favorable aux hébergeurs et à l’absence d’une responsabilité automatique.

La deuxième lecture de cet amendement a eu lieu les 21, 22 et 23 mars. Or, les amendements de Patrick Bloche relatifs à la responsabilité des fournisseurs d'accès et d'hébergement Internet (FAI et FHI) s'ils limitent quand même fortement la responsabilité des hébergeurs en cas d'hébergement de sites web illicites, ont été remaniés par le gouvernement.
Selon le sous-amendement 385, déposé par la ministre de la Culture Catherine Trautmann, les hébergeurs ont l'obligation de transmettre à l'autorité judiciaire les données sur les auteurs de contenus.


Patrick Bloche a voulu rassurer les hébergeurs en indiquant, pendant la discussion, que la vérification d'identité ne relevait pas de leurs responsabilités.


Les internautes auront l'obligation de fournir une identité et une adresse exacte, faute de quoi ils risquent une amende de 50 000 fr. et /ou 6 mois de prison.

Le risque de cet amendement, s'il devenait définitif serait de fournir une base de donnée extrêmement fiable aux hébergeurs de sites gratuits….

La proposition de Directive communautaire du 18 novembre 1998, modifiée le 1er septembre 1999, sur le commerce électronique traite également cette question de responsabilité. Elle opte pour l’irresponsabilité ou la quasi-irresponsabilité des professionnels du transport et du stockage de données sur les réseaux télématiques.

Elle pose le principe d’une absence d’obligation générale de surveillance et de devoir de recherche active des faits illicites pour les prestataires techniques, sauf sur demande des autorités judiciaires ( article 15).

Une distinction est faite selon que le stockage est permanent, temporaire ou transitoire.

L’article 14 institue une limite de responsabilité en ce qui concerne l’activité de stockage permanent des informations fournies par les destinataires du service. L’exonération n’est envisageable que si le fournisseur d’hébergement n’a pas connaissance du caractère illicite de l’activité de la personne hébergée, et, en ce qui concerne une action en dommage, s’il n’a pas connaissance de faits ou de circonstances selon lesquels l’activité illicite est apparente. Il reste exonéré si, dès qu’il en a eu connaissance, a agit promptement pour retirer les informations ou les rendre inaccessibles.

Quant au projet de loi français sur la société de l’information, il opère une " distinction entre l’éditeur du service, qui doit être responsable de l’information mise à la disposition du public, et le prestataire technique qui n’est pas en mesure de contrôler systématiquement l’information qu’il n’aura pas élaborée. Les simples intermédiaires techniques ne devront pas voir leur responsabilité engagée en cascade ".

De plus, il en ressort que " le Gouvernement est favorable à l’instauration d’un régime de responsabilité tenant compte des rôles spécifiques des différents types d’intermédiaires techniques sur l’internet ". Et il distingue également " entre les opérateurs de transport qui, dans la continuité du droit des télécommunications, n’ont pas à connaître les contenus qu’ils transportent, et les opérateurs d’hébergement ".

Enfin, ce projet souhaite que la responsabilité pénale ou civile des intermédiaires d’hébergement puisse être engagée " s’ils n’ont pas accompli les diligences appropriées, dans le cas d’une intervention de l’autorité judiciaire mais aussi dès qu’ils auront été dûment informés d’un contenu présumé illicite ou portant atteinte aux droits d’autrui ".

Conclusion :

L’Internet n’échappe pas à la tendance à la multiplication des responsables afin que la victime puisse obtenir réparation. On en vient à imposer, comme dans le cadre de la législation de la consommation, un devoir de vigilance du professionnel pour décharger l’internaute (profane !). C’est à penser que l’Internet devient un outil de grande consommation, mais il faut garder à l'esprit que la notion de diffusion d’informations implique une responsabilité civique et que moralement, le " cyber-citoyen " doit prendre et assumer les décisions qui l’engagent.

Murielle-Isabelle CAHEN

Note De La Rédaction :
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